pdf Utilisation de thorium dans un centre de recherches (94 ko)
Circonstances
Pendant plusieurs années, un centre de recherches avait utilisé du thorium pour la synthèse de nouveaux matériaux ; l'utilisation de tout radioélément a cessé depuis une dizaine d'années. La salle où s'effectuaient les manipulations de thorium est contiguë à un local, destiné autrefois à du stockage et réhabilité depuis quelques mois en bureau.
Un dosimètre passif photographique, présent 24h/24 dans ce bureau, a enregistré à deux reprises une dose trimestrielle de 3,5 mSv (sensiblement inférieure à la limite d'exposition trimestrielle pour les travailleurs de catégorie B). Une enquête demandée par l'IRSN a permis de déterminer l'origine de l'exposition du dosimètre. Des dépôts de thorium s'étaient accumulés au fil des ans dans les canalisations d'évacuation des eaux usées du laboratoire (le laboratoire ne possédait pas de canalisation d'évacuation spécifique des effluents radioactifs). La tuyauterie constituait ainsi une source radioactive continue dans le temps. Une recherche plus approfondie a mis en évidence la contamination des paillasses, sorbonnes, fours et canalisations avec une activité significativement supérieure au bruit de fond des appareils de mesure.
Mesures conservatoires et préventives
- Le laboratoire a été fermé et mis sous scellé immédiatement. L'intervention sur les canalisations et dans les galeries techniques est désormais soumise à une autorisation.
- Une opération de décontamination a été menée par une entreprise spécialisée.
- Plusieurs informations ont été dispensées auprès des personnels du laboratoire et des personnes compétentes en radioprotection des laboratoires voisins.
- Les personnels techniques intervenant sur les installations ont reçu une formation spécifique sur les risques chimiques et radiologiques.
Conséquences radiologiques
- Les conséquences radiologiques sont surtout liées à la contamination des locaux et des canalisations. Le volume des déchets produits, par les travaux d'assainissement, a été de 20 fûts de 200 litres.
- Les examens radiotoxicologiques effectués sur plusieurs personnels susceptibles d'avoir été contaminés se sont révélés négatifs.
- Au moment de l'assainissement, un contrôle de la contamination atmosphérique s'est révélé négatif.
Leçons à tirer de l'incident
- L'utilisation des radioéléments naturels, même quand elle ne requiert pas d'autorisation de détention particulière, peut être tout aussi dangereuse que celle des radioéléments artificiels : il n'y a pas de différence entre une particule alpha artificielle ou naturelle ni entre un rayonnement gamma artificiel ou naturel ; de plus, les radioéléments naturels peuvent avoir des filiations longues, donnant naissance à des radioéléments de nature et de période variables.
- Les méthodes de travail devraient toujours être très rigoureuses. En effet, des années de mauvaises pratiques de laboratoire peuvent avoir des conséquences néfastes immédiates et différées sur la santé et l'environnement. En plus des pollutions, elles peuvent aussi engendrer des coûts financiers importants de remise en état des installations ; dans le cas présent, les frais d'assainissement ont été évalués à 200 000 euros.
- Le personnel de maintenance devrait être systématiquement formé aux risques encourus, en particulier sur les installations anciennes qui peuvent avoir changé de thème de recherche et cacher ainsi la présence de risques anciens.
- Un contrôle régulier de la radioactivité ambiante des laboratoires pourrait permettre de détecter et d'enrayer rapidement les contaminations.
- Une cartographie "point zéro" devrait être effectuée avant la mise en service de tout nouveau local. Les cartographies ultérieures auraient ainsi une meilleure pertinence.
- Une canalisation spécifique pour les effluents liquides contaminés devrait être utilisée afin de collecter l'ensemble de ces déchets dans une cuve de décroissance. Un contrôle de cette même canalisation devrait être effectué régulièrement.
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